14 janvier 2018

Scandale : l'école de vos enfants est-elle toxique ?


Informations aux élèves, aux parents, aux enseignants, au personnel périscolaire et aux riverains.

Robin des Bois poursuit la publication des résultats de la campagne nationale de diagnostics des écoles sur sites pollués.

Les écoles et autres lieux d’accueil des enfants ont souvent été construits sans tenir compte des pollutions historiques des sols et de la dispersion des déchets, effluents et remblais en vigueur au XIXème et au XXème siècle. La scolarisation s’est installée sans frais et sans soucis sur ou à côté de sites pollués. Les écoles construites au XXème siècle ont aussi été cernées par des services de proximité comme les garages, les stations-service et les pressings.

Depuis 2012, une campagne nationale est déployée sous la responsabilité du Ministère de l’écologie pour mieux connaître l’empreinte des activités industrielles et commerciales historiques et éteintes sur les établissements accueillant des enfants et des adolescents. Les diagnostics concernent les crèches, les écoles maternelles et élémentaires, les collèges et les lycées, les instituts médico-éducatifs bâtis sur des sols pollués ou à proximité immédiate de sols pollués. Tous ces lieux pédagogiques sont qualifiés par la doctrine française sur les sites pollués d’« établissements sensibles » en raison de la présence potentielle de polluants susceptibles de perturber les différents modes de développement des enfants et des adolescents. L’enfance n’est pas la seule victime potentielle du passé. Les enseignants, les auxiliaires de scolarité, les personnels de gardiennage, de maintenance et d’encadrement hébergés dans des logements de fonction sont aussi exposés. Mais pas seulement ! Ces campagnes de dépistage et d’identification des pollutions historiques dans les écoles intéressent aussi les riverains et leurs enfants. Selon leur situation géométrique et hydraulique, ils peuvent être dans une situation égale, allégée ou aggravée par rapport à l’établissement sensible diagnostiqué.

Les conclusions des diagnostics sont restées confidentielles et tendent à s’effacer alors que le maître mot de la démarche est de les garder en mémoire et de les partager. Robin des Bois a entrepris depuis mai 2016 de rassembler toutes les synthèses des diagnostics et de solliciter à cet effet toutes les préfectures et autres services de l’Etat concernés. La CADA (Commission d’Accès aux Documents Administratifs) a validé la légitimité de l’action de Robin des Bois.
 
En juillet 2014, la liste nominative des établissements à diagnostiquer s’élevait à 1960 (sources : Ministère de l’écologie / BRGM, 2012, 2013, 2014). Cette liste est aujourd’hui effacée du site du Ministère. Elle a été capturée par Robin des Bois courant 2015 et est mise à disposition au début de chaque département. Il ressort d’un document complémentaire publié en octobre 2014 par le BRGM que le nombre d’établissements à diagnostiquer s’élève à 2320.

  • Aujourd’hui, seuls 1397 établissements ont été diagnostiqués ou sont en cours de diagnostic.
  • Une centaine ont été écartés de la démarche pour deux raisons :
  • des recherches complémentaires ont montré que les activités historiques polluantes étaient mal localisées.
  • la direction des établissements a refusé que le diagnostic de la pollution potentielle soit réalisé.
  • Il reste qu’au moins 1000 établissements sont jusqu’à nouvel ordre mis sur la touche comme par exemple les écoles primaires et les lycées à Paris intra-muros.
Il manque la volonté politique et des financements pour aller au bout de la démarche, y compris dans l’ancienne région Rhône-Alpes qui a été exclue dès le départ au motif que le recensement des activités polluantes historiques n’était pas terminé en 2012.

Les établissements sont classés en trois catégories :
  • Catégorie A : les sols de l’établissement ne posent ou ne poseraient pas de problèmes sanitaires.
  • Catégorie B : les aménagements et les usages actuels permettent de protéger les personnes des expositions aux pollutions, que les pollutions soient potentielles ou avérées. Des modalités de gestion de l’information doivent cependant être mises en place pour expliquer ce qui doit être fait si les aménagements ou les usages des lieux venaient à être modifiés.
  • Catégorie C : les diagnostics ont montré la présence de pollutions qui nécessitent la mise en œuvre de mesures techniques de gestion, voire la mise en œuvre de mesures sanitaires.
Robin des Bois a été destinataire de 1051 diagnostics et a été informé du classement de 53 autres établissements en Normandie sans parvenir pour l’instant à avoir communication des diagnostics correspondants. Après la diffusion des diagnostics des régions Sud (Provence-Alpes-Côte d’Azur), Hauts-de-France, Ile-de-France et Paris intra-muros, Robin des Bois diffuse ce jour l’intégralité de son dossier.

Résultats de la campagne nationale au 24 novembre 2017 :
  • 8,3% des établissements sont classées C
  • 52,7% des établissements sont classés B
Le Ministère de l’écologie d’après les premières campagnes test de diagnostics estimait à 1 à 2% le nombre total d’établissements classés en C et à 23 à 33% le nombre d’établissements classés en B. Il s’avère que ces prévisions étaient trop optimistes.
Les classements tels qu’ils ont été établis par les bureaux d’études et validés par le Ministère de l’écologie peuvent parfois susciter des étonnements ou des demandes d’éclaircissement. Deux établissements du même groupe scolaire situés à la même adresse peuvent être classés en A et en B ou même en A et en C. C’est le cas par exemple de l’école maternelle et de l’école élémentaire du groupe scolaire Madrague de Montredon à Marseille. Dans l’école maternelle, les teneurs en plomb dans les sols superficiels ne poseraient pas de problème, dans l’école élémentaire, elles dépassent les niveaux déclenchant le dépistage du saturnisme infantile.

La liste des établissements à diagnostiquer a été faite en croisant leurs coordonnées géographiques avec la base de données BASIAS qui recense les activités commerciales et industrielles potentiellement polluantes (248.000 installations) et la base de données BASOL qui recense les sites pollués par des activités industrielles historiques ou existantes. Pour faciliter l’appropriation des lecteurs à ces bases de données, Robin des Bois leur propose la méthodologie suivante (cliquez). Les dossiers permettent de faire une plongée dans l’archéologie industrielle de chaque région.

La fermeture du collège Saint Exupéry à Vincennes (Val de Marne) montre qu’il y a des failles dans le dispositif. A l’occasion de travaux d’extension, une pollution par des solvants chlorés à été mise en évidence et a rappelé aux autorités les anciennes activités industrielles en contiguïté du site au début du XXème siècle, probablement un atelier de travail des métaux spécialisé dans les œillets métalliques (fiche BASIAS). Cet atelier était implanté dans une impasse complétement disparue de la mémoire cadastrale et administrative.

Les diagnostics ne concernent pas les établissements scolaires situés sous l’influence d’activités commerciales et industrielles existantes. C’est ainsi que des écoles de Montreuil (Seine-Saint-Denis) ont échappé à un diagnostic méthodique et approfondi s’étendant sur plusieurs mois. Selon Robin des Bois, le groupe Jules Ferry aurait dû être intégré à la campagne puisque l’activité actuelle de la SNEM (Société Nouvelle d’Eugénisation des Métaux) a été précédée sur la même parcelle par une superposition et une succession de 5 usines depuis 1928.

Dans ces diagnostics, les polluants ne sont pas systématiquement nommés. Les trois grandes familles sont les polluants métalliques au premier rang desquels le plomb, les solvants chlorés et les hydrocarbures au premier rang desquels le benzène, le toluène, l’éthylbenzène et le xylène.
La bonne qualité de l’eau, des sols, de l’air dans les établissements accueillant des enfants et des adolescents est primordiale. Les polluants ont des impacts sur le développement du cerveau, du système nerveux, du squelette et peuvent avoir des effets différés sur les capacités de reproduction. La plupart des polluants incriminés sont considérés sans seuils d’effets – autrement dit, ils peuvent être nuisibles pour la santé des enfants à de très petites doses – et l’objectif doit être de réduire avec constance leurs concentrations à un niveau aussi bas que possible.

Il ne suffit pas de sceller des portes, de condamner des pièces, de purger les robinets, d’ouvrir les fenêtres, de recouvrir de plastique ou de terres propres les sols contaminés pour pouvoir affirmer que les actions correctives ont été menées à bien. Il faut extraire les sources de pollution. Le problème des collectivités et notamment de la Mairie de Paris, c’est qu’une dépollution coûte cher, oblige dans certains cas à fermer les établissements et dure plusieurs mois ou années.

Faute de moyens financiers mais sans doute aussi parce que les résultats des premières vagues de diagnostics sont plus inquiétants que prévu, les diagnostics sont suspendus. Robin des Bois demande conjointement au Ministère de l’écologie, au Ministère de la Santé et au Ministère de l’Éducation Nationale, en partenariat avec les collectivités, de mener à bien l’intégralité de cette campagne pionnière et unique au monde.

Le scandale continue

Selon la circulaire du 8 février 2007 émise par le Ministère de l’écologie, la construction d’établissements scolaires sur des sites pollués doit être évitée. Cette circulaire n’est pas strictement appliquée et à titre d’exemple, le collège Confluence d’Ivry-sur-Seine a été achevé en 2015 et n’ouvrira pas avant la rentrée 2018 suite à la mauvaise évaluation initiale de la pollution au mercure. Le collège a été construit à l’aplomb d’une ancienne usine de lampes Philips. Il en va de même pour le groupe scolaire sur l’écoquartier de La Courrouze à Rennes dont la construction sur une ex cartoucherie a été interrompue en 2016 à cause d’une pollution métallique et en solvants chlorés plus importante que prévue. Les bâtiments scolaires déjà construits devraient être reconvertis en bureaux.

Il revient aux enseignants, aux parents et aux élèves de s’assurer que toutes les recommandations émises par les services de l’Etat ont été appliquées et continueront à l’être pendant toute la durée de vie de l’établissement.
Il leur revient aussi d’examiner régulièrement la conformité de ces recommandations à l’évolution de la connaissance des risques sanitaires et de la réglementation.

Pour les régions Sud (Provence-Alpes-Côte d’Azur), Hauts-de-France, Ile-de-France et pour Paris intra-muros, Robin des Bois a réalisé un résumé de chaque diagnostic en y apportant des commentaires et des liens supplémentaires et éventuellement des illustrations. Par précaution, le mode conditionnel a parfois remplacé le mode indicatif employé par les bureaux d’étude quand ils décrivent les risques. Des expressions en langue de bois ont parfois été remplacées par les mots qui conviennent (exemple : « les sols ont été pollués par les activités industrielles » au lieu de « les sols ont été influencés par les activités industrielles »).

Dans certains cas, des lettres d’accompagnement ont été envoyées par les DREAL (Directions Régionales de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) aux chefs d’établissement et sont plus explicites que les diagnostics. Quand elles nous ont été transmises – cas particulier de la région PACA – elles ont été jointes aux diagnostics publiés par Robin des Bois et apportent des précisions intéressantes sur les teneurs et l’identité des polluants. Enfin, un résumé des interventions d’assainissement de l’ADEME déjà réalisées ou à venir en date du 2 novembre 2017 est mis à disposition.

Les circulaires du 4 mai 2010 et du 17 décembre 2012 et le document BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) du 8 octobre 2014 présentent les modalités, les perspectives et les premières conclusions de cette démarche.

Problématique plomb

Certains diagnostics réalisés avant juin 2014 restent dans l’attente des nouveaux avis du Haut Conseil pour la Santé Publique.
D’autres diagnostics ont été réalisés après juin 2014 et tiennent compte de ces avis à savoir, seuil de vigilance à partir de 100 mg/kg dans les sols et seuil de dépistage du saturnisme infantile à partir de 300 mg/kg dans les sols.
L’objectif des recommandations attachées à chaque diagnostic est d’éviter l’accès aux enfants des terres contaminées, l’ingestion par la pratique du porté main-bouche ou l’inhalation des poussières plombifères.
 

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